En 1956, la SNCF crée un nouveau service reliant directement Paris et l’Angleterre via l’aéroport du Touquet. Pour la station balnéaire le Touquet-Paris-Plage, très endommagée pendant la guerre, c’est aussi un moyen de repartir à la conquête de ses plus fidèles clients parisiens et les sujets de Sa Très Gracieuse Majesté qui ont fait ses riches heures. Tout commence après guerre avec la remise en activité de l’aéroport en fort mauvais état, mais qui par un heureux hasard, obtient du Ministère de l’Air la possibilité d’accueillir des avions gros porteur (du moins selon les spécifications techniques de l’époque). D’importants travaux sont réalisés et une piste “en dur” de 1200 puis 2250 m de long est construite. Le nouvel aéroport permet la mise en service d’avions cargo à l’aspect ventru doté d’une double porte avant en coquille, le Bristol 170 Freighter, un bimoteur à train fixe pas très élégant mais qui peut emporter des voitures et leurs passagers. Une version uniquement dédiée au transport de passagers, le Bristol 170 Bristol Wayfarer, est aussi en service. En 1948, la compagnie britannique Silver City inaugure ainsile premier service aérien ferry entre l’aéroport de Lympne et celui du Touquet Paris-Plage (la Silver City sera associée ensuite à la CAT, la Compagnie Air Transport qui ne dispose pas au début de ses propres appareils).
Gagner du temps sur le temps…
Mais la liaison Paris gare du Nord Le Touquet est dévolue avant tout au chemin de fer. C’est un autorail De Dietrich qui assure d’abord le parcours, avant d’être remplacé dès 1957 par un autorail “tout inox” X 2051 dont la ligne moderne et l’éclatante caisse étincelante sont à l’origine de la désignation ” Flèche d’Argent”. À cette époque, le train arrive en gare d’Étaples et les passagers sont ensuite transférés en autocar jusqu’à l’aéroport. Le survol de la Manche en Bristol Wayfarer ne dure que 20 mn jusqu’à l’aéroport de Lydd dans le Kent où patiente un autocar anglais qui file ensuite vers Londres. Il faut alors 6 bonnes heures pour relier Paris à la capitale de l’Angleterre. En 1958, une remorque attelée à l’autorail permet d’augmenter la capacité en passagers. Pour la saison 1964, un nouvel autorail type X 4500 est mis en service tandis que désormais, un embranchement de chemin de fer permet de rapprocher les voyageurs de l’aéroport. Fini l’autocar, mais il faut parcourir une bonne centaine de mètres à pied avant de passer la douane. Les passagers ont aussi droit à de nouveaux avions plus modernes (Vickers Viscount, Bristol Britannia ou DC-6) de la British United Airways (BAU) qui a absorbé la Silver City. Ils assurent un service plus rapide et la durée du voyage se réduit alors à 4H15 mn.
Un train sur le tarmac
En 1971, nouveaux changements : si le transport ferry de voitures par avions Bristol décline, celui de passagers perdure et la ligne ferroviaire se prolonge encore. Elle traverse littéralement les pistes de l’aéroport pour déposer les passagers au pied même de l’aérogare et de la tour de contrôle ! La vue d’un train à quelques mètres des hélices d’avions est d’ailleurs un spectacle qui a marqué bien des Touquettois. La modernisation se poursuit avec l’arrivée de nouveaux appareils de la British Caledonian (qui a repris les activités de la BAU) et ses BAC 1-11 à réaction. Le matériel ferroviaire évolue lui aussi avec l’arrivée des belles Rames à Grand Parcours (RGP). Paris et Londres ne sont plus qu’à 4 heures de distance… Le Touquet-Paris-Plage relie Gatwick mais une nouvelle destination est proposée vers l’aéroport de Southend tandis que deux autres dessertes pour Southampton et Bournemouth sur la côte sud sont prévues.
Le train à réaction
Dès 1973, on voit aussi les premières expérimentations avec des rames RTG (Rame turbine à gaz) ou turbotrains. Le son de ces rames (et l’odeur de kérosène persistante qui s’en dégage) n’a alors rien à envier aux aéronefs sur la piste. Mais la Flèche d’Argent semble avoir vécu. Malgré un tarif finalement attractif, la ligne s’avère peu rentable et elle disparaît fin septembre 1980. Elle a toutefois profondément marqué la station balnéaire. Pour beaucoup d’habitants ou de touristes, voir l’arrivée du train et l’embarquement des passagers dans les curieux Bristol 170 étaient durant les Trente Glorieuses une véritable attraction dominicale.
Au milieu des années 1960, un premier quai est construit pour accueillir les passagers à la descente de l’autorail, ce qui évite le transfert en autocar depuis la gare d’Étaples.
Un Bristol Freighter de la Silver City chargeant un élégant cabriolet anglais, of course….
Publicité de la SNCF pour la Flèche d’Argent au début des années 1970. “226 Francs aller et retour !” soit à peu près l’équivalent en euros actuels…
Une rame RGP (aux couleurs des Turbotrains contemporains) arrive à même le tarmac de l’aéroport Le Touquet-Paris-Plage. C’est désormais la British Island Airways qui, depuis 1975 assure les vols. L’avion est un (rare) biturbopropulseur HPR-7 Dart Herald.
(photo la Vie du Rail)